La cité Phocéenne se met à l'éolien. Hervé Martel, président du directoire du Grand Port Maritime de Marseille (GPMM), a présenté ce 1er octobre à Fos-sur-Mer (Bouches-du-Rhône) les contours du projet «DEOS», plateforme de construction et d’assemblage d’éoliennes flottantes sur le môle central de sa zone industrialo-portuaire, doté de 550 millions d'euros.
«Nous apportons une brique supplémentaire à notre ambition de devenir un hub énergétique majeur à l’échelle nationale et européenne. Nous allons investir plus d’un demi-milliard d’euros dans l’aménagement de 75 à 80 hectares de terre-plein pour accueillir les activités industrielles, le dragage de 45 à 50 hectares à flot pour stocker temporairement flotteurs et éoliennes avant leur acheminement en mer et la réalisation de près de 1000 mètres de quai pour recevoir les composants depuis les usines de fabrication, annonce-t-il. Notre objectif est de proposer la totalité des prestations sur un site unique et compact.» Les titulaires de marchés de fermes flottantes pourront y disposer de tous les services et espaces nécessaires.
Le Port entend réussir à concrétiser cette plateforme pour fin 2028 et estime sa capacité de production future à 25 éoliennes par an, soit un système complet (flotteur métal ou béton, nacelle, mât, pales) tous les 15 jours. «Nous ne sommes pas concurrents, mais complémentaires des installations de Port-la-Nouvelle (Aude), assure Hervé Martel. Nous échangeons déjà avec nos homologues et l’Etat. Il sera difficile en effet d’avoir deux constructeurs différents sur le même lieu.»
Pour exposer les enjeux du projet, le Port organisera une concertation préalable du 14 octobre au 23 décembre sur les communes de Fos, Port-Saint-Louis-du-Rhône, Martigues et Port-de-Bouc, sous l’égide de la Commission Nationale du Débat Public (CNDP). Elle comprendra des réunions publiques, des expositions statiques et itinérantes, des rencontres avec des jeunes… «Nous ne visons pas que les besoins français dans l’éolien flottant, nous ciblerons aussi l’Italie, l’Espagne, la Grèce, voire l’Europe du Nord», poursuit Hervé Martel. DEOS devrait mobiliser 250 personnes sur le chantier (2027-2028) et pourrait représenter à terme entre 500 et 1500 emplois sur le site.
Pierre fondatrice
Le maire de Fos-sur-Mer, René Raimondi, salue l’initiative du GPMM de «reprendre enfin son rôle d’aménageur» puisque l’idée est de préparer les terrains en amont de la désignation des futurs exploitants. «C’est une vraie vision d’avenir. Mais il faudra écouter les populations pour éviter les conflits d’usages» avertit-il, pointant notamment les limitations qu’ont entraînées les trois éoliennes pilotes de «Provence Grand Large» d’EDF Renouvelables pour les plaisanciers habitués à naviguer historiquement dans les mêmes eaux.
Maire de Port-Saint-Louis-du-Rhône où ces éoliennes s’élèvent à 17 km de ses côtes, Marc Alvarez exprime la même exigence, mais se réjouit que «DEOS pose une pierre fondatrice pour toute une chaîne de valeur». Il perçoit même le dossier comme un «coussin de sécurité» pour la réindustrialisation au cas où les autres projets annoncés sur la ZIP ne verraient pas le jour (Carbon, H2V, GravitHy, Elyse Neocarb…).
Les impacts sur les trafics portuaires sont estimés, par exemple, à 400000 à 500000 tonnes par an de granulats si des flotteurs en béton s’y construisent. «Sur le long terme, DEOS s’autoalimentera par les activités de maintenance. Une éolienne doit normalement revenir à terre tous les dix ans pour être entretenue» confie Hervé Martel. De quoi faire par la même occasion le Port un hub d'économie circulaire.